TRAILSTORE au Marathon du Mont-Blanc:

Le CR de Casti… (Merci à lui 😉

Novembre 2014, je surfe sur  différents sites de course à pieds et de trails et je découvre une vidéo « best moments  marathon du Mont –Blanc 2014 ». Waouw, une vidéo qui me donne la chaire de poule. Images à couper le souffle, musique de feu, pas de doutes j’en serai dès que ce sera possible… Malgré la promesse faite après le Grand Raid des Pyrénées 80 km (unique et dernier trail) , je craque et je me préinscris au 80 km du Mont-Blanc… GRP, une course calvaire due à des erreurs de débutants concernant l’alimentation en course. Trente km à marcher comme un robot et chaque mètre de dénivelé négatif équivalait à une chute…

Des jours et des nuits à m’interroger : «  et si je m’étais hydraté convenablement… et si , j’avais mieux travaillé les descentes à l’entraînement… et si…. ». Bref, j’étais partagé entre effacer ce souvenir et me prouver que ce n’était qu’un apprentissage du milieu spécifique du trail…

Quelques semaines plus tard, je suis officiellement repris. Je suis heureux et inquiet aussi ; je n’ai pas envie de revivre le même scénario.

A partir de ce moment, je collecte les plans d’entraînement sur internet, dans les magazines, je consulte les autres trailers. Je me décide de suivre un plan du mag ‘ Esprit trail’ sur 12 semaines… programme destiné au GRP.

Je respecte le programme scrupuleusement à raison de 4 séances par semaines plus une optionnelle en fonction de l’état de forme. Tout se passe bien. Pas de blessures. Pas de coups de ‘mou’. Préparation parfaite. A partir de ce plan, j’aurai travaillé davantage le volume (couplé à du VTT) et les successions ‘montées-descentes’.

A quelques semaines du jour J, une superbe nouvelle arrive du ciel : j’aurai  mon suiveur. Mon pote Jey va m’assister sur le parcours. Je pourrai profiter de son expérience, de ses conseils, de sa connaissance du parcours : un avantage substantiel.

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25 juin 2015. La tension monte. Je deviens nerveux. Qu’est-ce-que je fous ici ? J’ai envie de rentrer chez moi. Je me promets à moi-même et à ma famille que j’arrête ces conneries de trail. Non, ce sera le dernier. J’exige de mon épouse qu’elle m’interdise de m’inscrire à un prochain trail ! J’ai peur de ne pas arriver au bout de ce 80 km. Je stresse !

26 juin 2015. Le réveil sonne à 02h45. La nuit a été très courte et le sommeil a été très mauvais. Je ne suis pas trop optimiste d’autant qu’on annonce une température avoisinant les 30 degrés.

J’ai analysé le parcours et je découpe le parcours en 3 parties : entrée, plat et dessert. L’entrée comporte ‘Chamonix- Le Buet’ ( km26) ; suivi du plat de résistance ‘col de la Terrasse – Tête de l’arolette’ jusqu’à ‘Les Bois’ (km 64) puis , ce qui me semble le plus accessible , le dessert ‘Montenvers- Plan de l’Aiguille.

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Le départ est donné à 04h00. On attaque directement l’ascension du Brévent (1500m D+ sur 9 km). Je prends  un bon départ ; je suis bien calé dans une allure qui me convient pourtant les sensations ne sont pas extraordinaires. J’ai l’impression de manquer de puissance, que je dois déjà puiser dans mes réserves. J’avale un gel et je veux patienter jusqu’au ravito du 11ème km pour faire le point. Je continue malgré tout l’ascension au même tempo… Yes, j’y arrive enfin et  j’entame la descente (pas très technique) très prudemment jusqu’au ravito…  Un magnifique panorama s’offre à nous , le massif du Mont-Blanc se présente devant nous aux premières lueurs du jour. Exceptionnel.

Suivant les conseils de Jey, je dois consommer du ‘salé’ : j’avale salami, fromage et biscuits TUC.  Trente secondes plus tard, tout mon repas se retrouve au sol…  Rien n’est passé. Tant pis, je me dois de continuer jusqu’au deuxième ravito ‘ le Buet’ qui constitue la fin de mon ‘entrée’. Je me sens mal. Si Jey était là, je m’arrêterais immédiatement.

A peine après avoir quitté ce premier ravito, un coup de mou apparaît… Je fouille dans mes poches et j’attrape un sachet de bonbons Squeezy energy. Je mâche quelques bonbons et immédiatement je ressens l’effet du sucre sur mon organisme. Du coup, le moral revient quelque peu. Je parviens à remplacer les idées négatives par des images positives… Les kilomètres passent et , pour la première fois, je vois les choses positivement. Je fais le bilan : au quart de la course, tout va bien. Pas de bobos.

J’arrive ‘au Buet’. Je croise Jey pour la première fois. Il me signale que j’ai l’air bien et je le confirme. Ces bonbons ont orienté ma course, m’ont rendu énergie et moral. Je croise des copains belges qui m’encouragent… yes ça fait du bien… Jey s’occupe de remplir mes bidons, me propose les choses à manger. Je suis chouchouté ! Et c’est avec un gros moral que j’entame le plat principal  de mon trail : le col de la Terrasse. Rien qu’à voir le profil de cette difficulté me donne la migraine.

Le début de l’ascension me paraît facile. Nous sommes à l’ombre et le chemin monte tout doucement. Je peux courir facilement. Malgré tout, je ne force pas et je respecte ma règle : 2 gorgées d’eau tous les 150 m de dénivelé. Soudain, on quitte l’ombre et la pente se fait plus  sèche… le soleil tape fort et c’est de plus en plus difficile de respecter cette foutue règle que je me suis imposée : impossible de m’arrêter après 2 gorgées… J’aperçois les traileurs loin devant moi et je me rends compte de la difficulté de ce col… C’est l’enfer. Tout le monde est plié en deux sur les bâtons. Tout le monde souffre. Et miracle, une source apparaît au milieu de l’ascension… Adieu ma règle. J’avale 1 litre et le sommet me semble plus proche. Pas à pas, j’arrive au sommet et je bascule vers Emosson… Les névés sont utilisés comme des toboggans ; ça rafraîchit tout le corps…  La descente est prudente et enfin les espaces entre les trailers permettent de progresser à sa propre allure. Personne juste derrière et personne juste devant : le paradis ! J’arrive au ravito. Je fais le plein et le bilan est toujours positif mis à part quelques échauffements au niveau du talon gauche mais rien d’alarmant. Presqu’à la moitié du parcours… yes !

J’entame ce qui constitue, selon moi,  la dernière grosse difficulté du parcours : tête de l’arolette. Après ce col, ce sera du gâteau ! Fort de ces pensées, je livre un effort constant. La montée est longue mais beaucoup moins éprouvante que le col précédent. Je rencontre un Irlandais et on discute gentiment. C’est super agréable et le temps passe vite. Je me sens bien et les premiers trailers devant moi sont dans le ‘dur’. C’est bon pour ma confiance. Ma préparation a été bonne. Mon moral est au zénith.  Je connais un petit moment d’euphorie. Je cours toujours sur les rares parties plates et en descente. Par rapport au GRP, je suis en nette progression. Cinquante bornes et je peux toujours courir !!! Je franchis cette difficulté et je sais que Jey m’attend un peu plus bas.

Jey m’accueille avec tous les superlatifs possibles : «  tu réalises un super truc mon gars ! Come on , allez !!! » . Malgré cela, mon allure se dégrade un peu et mon pied gauche connait les premières ampoules sous le talon. J’avale une soupe et j’essaie de me projeter sur un éventuel chrono final. Je bois de plus en plus et de plus en plus souvent. Il me reste 27 km dont 16 km de descentes. Oui, pour la première fois, je me vois à l’arrivée. Pensées positives.

Je repars pour 9 km de descente où je reverrai Jey pour la dernière fois. Jey me lance : « attention, il y  quelques tape-culs ! ». Cela signifie qu’il y aura quelques bosses malgré tout. Merci Jey ! Ces 9 km me semblent une éternité. Neuf km me semblaient plus courts au début du trail. Un coureur français me rassure en me disant que c’est dans le poche à ce stade…

On arrive enfin au ravito avant la partie ‘dessert’. Des copains belges m’encouragent. C’est top. Je ne traîne pas car je veux éviter d’ effectuer la descente finale vers Cham dans l’obscurité.

La partie la plus facile s’offre à moi. Onze km d’ascension puis 7 km de descentes… Jey effectuera la descente finale avec moi. 1100m de D+ puis 1200m de D-…

Autour de moi, les discours sont relativement optimistes. Certains me parlent d’une ascension de seulement 600 m D+ puis d’une longue partie roulante et pratiquement plate. Croyant terminer facilement, je grimpe à vive allure. J’oublie la douleur au pied gauche : une grosse ampoule sous l’entièreté de mon talon gauche. Cela fait mal mais j’en ai vu d’autres. Dans ma tête, Montenvers est à moi très bientôt…

Je me rends compte après quelques hectomètres que cela monte tout de même assez fort. Peut-être me suis-je vu plus costaud que je ne l’étais ? J’ai à peine quitté le dernier point de ravitaillement que j’ai déjà très soif. Je suis dans le dur. Mes jambes ont de plus en plus de mal à monter ces rochers qui sont disposés sur le sentier. Tous les 50 m, je m’arrête. J’ai soif. Je m’étire un peu, je laisse passer des autres trailers qui sont dans le même état. Montenvers devient un enfer. J’avale gel après gel et ma réserve d’eau fond à vue d’œil. Il faut laisser passer l’orage. Je n’ai plus de ‘power’ dans mon corps. Je ne peux imaginer m’arrêter ici. Quel est l’idiot qui a imaginé que cette partie serait un dessert synonyme de plaisir ? Je m’en veux. Je ne peux plus poser le talon gauche au sol. Je suis très mal. Je continue malgré tout ma lente progression et après une grosse difficulté un ravitaillement additionnel apparaît… Dû à la chaleur, les organisateurs ont ajouté un point d’eau et de thé. Cela me booste. Mes bidons remplis, je repars sur un meilleur tempo. Montenvers n’est plus qu’à 40 min. La pente devient moins pentue. Le coureur devant moi recommence à courir et je lui enchaine le pas. Je peux courir ! Courir est un trop beau mot pour décrire ma foulée mais bon, dans mon esprit je cours ! La mer de glace se présente enfin devant moi. Oui Montenvers est presqu’à moi. Je me revois avec mes kids et ma femme ici même il y a quelques années. Ces images me rendent le moral. Allez, le dernier ravitaillement est à portée… Pour la première fois, je vais y rester un peu pour recharger les batteries et m’étirer. Dans 5 km, Jey sera là et ce sera plus facile…

Un bénévole me signale qu’il reste 5 km jusqu’au refuge de l’aiguille puis 7 km de descentes. Je repars en courant tout doucement. Je n’ai plus que 200m de D+ avant  la descente finale. Le chemin n’est pas trop difficile mais zigzague dans tous les sens. Il est temps que je termine. Des concurrents reviennent très vite de derrière puis disparaissent très vite devant. C’est dur ! A ce rythme, je vais perdre 50 places mais peu importe. Mon orgueil de compétiteur ne le supporte pas. J’essaie de garder un bon rythme mais je souffre et je ne pose plus que l’avant du pied gauche au sol ; le pied droit est nickel. Et puis, j’aperçois le refuge. Yes, un sentiment de bonheur indescriptible. Ce chalet j’en ai rêvé… Pendant ma préparation, j’ai regardé à de nombreuses reprises la vidéo ‘best moments’ et , à chaque fois, je me suis imaginé à cet endroit  sans savoir que c’était dans le final. Il domine toute la vallée. Un jour, j’y dormirai , c’est sûr. Quel magnifique endroit. Je regarde une dernière fois les sommets. Malgré la souffrance, je suis déjà nostalgique. Je salue les bénévoles. Le soleil se couche. Comme espéré , je bascule alors qu’il fait encore jour mais plus pour longtemps… Il est 21h05… J’allume déjà ma frontale. Jey sera là dans quelques instants…

L’arrivée est 1200m plus bas. Sept kilomètres de chemins qui serpentent et qui me semblent interminables. J’aperçois Jey alors qu’il me reste 6 km dont 1,5 km sur la route. Je fais mon maximum pour ne pas perdre de temps mais avec mon pied gauche endommagé chaque pas est un calvaire. On aperçoit les lumières de la ville mais j’ai l’impression qu’on ne s’en rapproche pas. J’écoute les conseils de Jey et j’essaie de passer là où il passe mais c’est pratiquement impossible. J’aperçois des frontales qui fondent sur moi et qui me dépassent ; une vingtaine de trailers me dépasseront dans cette descente. Je me tais et j’essaie de rester concentré. La souffrance est atroce. J’attends la route avec impatience. Jey m’encourage comme un dingue. Je suis comme un cycliste dans un contre la montre avec son directeur sportif derrière lui… Puis enfin la route apparait. C’est la délivrance. On progresse dans le rue principale où il y a énormément de gens. Toutes les personnes m’applaudissent comme si j’avais gagné la course. Un accueil formidable. Les frissons m’envahissent. Plus que quelques mètres. Je franchis la ligne d’arrivée en 18h25. Je suis 207ème. Pas trop mal pour un habitant du plat pays. Je suis très heureux. Je suis déjà nostalgique. Je retrouve des potes qui me félicitent. Satisfait du job après une très bonne préparation.

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Et surtout une interrogation survient quelques minutes après mon arrivée : quel sera le prochain ???

Merci à ma famille pour mes longues absences des derniers mois , à Jey & Fred, à ma mum et aux amis/amies qui m’ont soutenu…

Et je profite de ‘compte rendu’ pour remercier @trailstore_fr pour les conseils sur l’alimentation en course. Quelle différence par rapport au GRP ! Merci Laurent.

Et les Squeezy Energy gum ont orienté ma course !

Voici mon package :

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Souvenir de Cham (après 3 jours) :

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