La Transju’ (mance)

 

 

 

 

 

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« Ce n’est pas parce qu’il y a moins de dénivelé que c’est moins dur ! » Si après la course je devais résumer ce trail en une phrase ce serait celle là. Mais 3 jours ont passé et maintenant elle serait plus : « Dans le Jura, il n’y a pas le Mont-Blanc, mais la vue de Dôle n’a rien à envier au géant blanc ! » Ce trail est tout simplement superbe. Je vous fais le topo. Départ de Mouthe passage par Morez puis Prémanon, petite vue panoramique en haut de la Dôle et retour par le col de Porte pour une arrivée aux Rousses. Pour les skieurs ils reconnaîtront une partie du parcours de la Transjurassienne, la plus grosse course de ski en France.
72km et 3200 de D+. Ne vous fiez pas aux chiffres, le rapport distance/deniv est trop souvent banalisé pourtant je peux vous dire que ça gratte sévère.
Jour J: réveil 2h45. Bah oui le Départ étant à Mouthe je prends le bus à 3h45 pour le rejoindre. Ma femme et mon fils sont là mais je ne veux pas réveiller mon loulou à 3h pour que papa gagne 1h de sommeil. Comme dirait ma femme « t’y as voulu, t’y as eu ! ». Bref, petit déj comme d’hab sauf que ça a du mal à passer ce matin. Je ne me sens pas stressé mais ça ne passe pas. Je mange par petites portions malgré tout. Je vais poser la voiture aux Rousses et monte dans le bus. L’organisation est au top il y a 5 bus qui nous attendent et on a des sacs avec notre numéro pour faire rapatrier nos affaires histoire de pas se geler pendant 1h en tenue de fête. J’ai quasi rien avec moi, un pantalon et un coupe-vent, il fait déjà 13 degrés ce matin. L’ambiance est plutôt calme dans le bus, je suis à coté d’une fille et tente de briser la glace  » on est vraiment cinglés », elle me répond  » Sorry, I don’t speak French ». Ca tombe bien j’avais pas trop envie de parler !
5h: le gymnase est plein à craquer et le speaker commence à faire monter l’ambiance sur la ligne. J’écoute sans écouter je suis dans ma bulle. Je pars m’échapper parce que la 1ere partie est roulante et je sais qu’on va partir vite. Je retrouve une amie dans le sas de départ Lauriane Foulet-Moreau qui fera 2ème féminine. On papote 5 min et le départ est donné au fusil de chasse (baaam ! Envolée de moineaux).
Ça part à un bon rythme (4′ 05 au kilo pour les ouf des chiffres) mais la route s’y prête bien. On est un groupe de 8 coureurs à l’avant avec Lorblanchet, Perrignon, Sherpa, Humbert et d’autres. Je décide de pas me fier aux gazelles et de tenir la foulée de François Faivre. Sa gestion de l’an passé lui avait value la victoire donc je sais qu’il maîtrise.
Le rythme est soutenue et la 1ère partie ne permet pas de faire de gros écart. Il y a 1200 de déniv sur les 36 premiers kils. Il ne faut pas s’emballer se sont les montagnes jurassiennes de Russie ici. Ça monte ça descend sans arrêt.

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1er ravito

Tout se passe bien, sauf que mes baskets sont un poil grandes et mes pieds viennent taper le bout de mes chaussures dans les descentes raides. On est un bon groupe, je ne prends pas le risques de les perdre pour resserrer mes lacets, c’est mort !! Je sers les dents jusqu’à Morez où il y a un gros ravito et Anne m’attend pour l’assistance. J’en profiterai pour faire les ajustements.

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dans la descente de Morbier…

Morez: 36ème kilo. Je suis 5ème, on a avalé la distance en 3h16 je crois. Un bon rythme bien soutenu. Je retrouve Anne et Léon, et Julien Coudert mon coach avec sa femme Juliette Bénédicto (ouais ça envoie dans la famille mdr) avec leurs enfants. J’ai des frissons de les voir, c’est tellement bon. Ils sont à bloc et ça fait plaisir. Aller, resserrage de lacets, remplissage de bidons (ça c’est ma chérie qui s’en occupe aidé par mon fils de 20 mois qui voulait mettre les mains dedans 🙁 je vous laisse imaginer la scène) je chope des gels pour la suite, je bois un coup et repars. J’ai fais un ravito assez long du coup je repars en 8ème position en ayant perdu F.Faivre. m**** !
Et là… C’est le drame. Les jambes raides, le cardio à bloc, je suis collé. Les bosses sont raides et longues, je suis isolé sur les sentiers jurassiens. Sa m*** comme j’en ch**! Je trottine tant bien que mal mais la chaleur est écrasante. Je vide mes bidons à une vitesse folle au point de m’arrêter dans un abreuvoir à vaches pour les remplir et tremper ma tête dedans. 2 litres en 10 bornes ça cause… La montée à Prémanon est un long chemin de croix, rien de raide mais un faux-plat, ça court à 10km/h et si tu marches t’es mort. Il faut serrer les dents.

J’arrive à Prémanon, km 46. Anne est là… Mais pas moi ! Je suis au fond du gouffre je titube et j’ai mal partout. Elle me réconforte et me dit que devant ça souffre aussi. Derrière personne ne revient, on est tous dans le dur. Ca fait du bien de la voir! Je repars sans conviction mais il faut pas traîner sous peine de mettre le clignotant. Elle me demande où elle me rejoins et la seule réponse que je trouve est « le plus tôt possible!! ».

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le départ de Prémanon dans le dur le départ de Prémanon est un calvaire en plein cagnard

 

On attaque la dernière partie avant la montée de la Dôle. Je sais que le ravito du bas est à 4km du sommet. Je me fixe des objectifs à court terme pour ne pas gamberger et me tuer le moral. Juste avant le bas de la Dôle, Thibault Baronian me double dans une descente de ski, genre le truc hyper raide qui vous fout la banane l’hiver mais vous démonte l’été, en même temps on vient de monter l’autre versant, il ne fallait pas s’attendre à un truc de fillette. Lui il vole, moi je creuse! Ravito express avec Juliette et Clem son fils qui court comme un cabri.

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J’attaque la Dôle. Et je monte, et je monte, et je monte ! Que c’est long, que c’est dur. En plein soleil, avec cette grosse boule blanche en point de mire qui ne grossit pas et les coureurs du marathon qui nous dépassent tellement vite qu’on croirait reculer. Il fait toujours très chaud et je commence à avoir du mal à m’alimenter. Je me force à prendre mes gels pour ne pas claquer une hypo à 5 bornes du but, ce serait regrettable. Donc je les avales tout rond et je bois, encore et encore ! 2 gars m’ont doublé dans la montée dont 1 avec qui je ferai le début de la descente. Au passage au sommet, la vue est splendide. Le beau temps nous laisse un panorama à couper le souffle (on n’en a déjà plus des masses !). La descente est technique et piègeuse. Mon compagnon de route en fera les frais avec une belle chute, sans bobo, mais il sera frileux pour le reste de la descente.

la fameuse Dôle!!


Et maintenant, le col de Porte ! Quel est le mec qui a tracé ce chemin ? Amenez le moi je vais me le faire! Il est horrible ce sentier. Un mur, une rampe, un accès direct à la douleur ! Mon GPS rigolait en affichant 34’55 au kilo. Un calvaire. Sur le profil on dirait un petit tremplin, juste le petit truc qui vous renvoie du sang dans les cuisses. La réalité est bien différente, j’ai souffert! Je ne vous fais pas de dessin sur la descente… Pareil que la montée. Bon, moins raide, mais plus technique. Elle débouche direct sur le dernier ravito situé à 10km de l’arrivée. Il fait bien moins chaud et les orages pointent leur nez. Anne a eu la merveilleuse idée de me donner de la Vichy à boire (elle a du acheter un pack de bières pour payer la bouteille, à moins que ce soit l’inverse !?), ce fut la renaissance. Plus de douleurs gastriques, le corps reprend de la vigueur et la foulée se fait plus légère. Je m’accroche à un coureur du 23 km qui me ramène sur mes 2 comparses qui m’avaient lâché dans la montée du col de Porte (ils avaient la clef… De la porte ! Prooout je sors ! ok). Je me sens bien et j’arrive à courir à un bon rythme (autour de 4’20 au km toujours pour les ouf d’en haut), les 10kms s’enchaînent et on arrive déjà dans le fort des Rousses. Je le connais assez bien pour l’avoir déjà vu au départ de la Forestière 5 ans plus tôt ou même de nuit pour l’Oxytrail blanc (course début janvier en nocturne que je conseille vivement)! Plus que 2 km et je me tire la bourre avec Régis Coumenges sous un orage de fou, la pluie a créée des flaques grosses comme des mares et on ne se fait pas prier pour passer tout debout, ça rafraîchit c’est un vrai bonheur. On arrive quasi ensemble sur le stade d’arrivée. Je lui dis d’y aller en pensant passer la ligne avec mon fils, pas de bol il sera en train de dormir dans la voiture. Dommage! je l’ai vu toute la journée et il a été adorable je ne peux pas lui en vouloir;

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après le combat le fair-play !!

Je passe la ligne en 8ème position en 7h23’40 à 20 secondes de F.Faivre qui se classe 6ème. Je suis tellement heureux de mettre battu, le résultat est plus que correct et de bonne augure pour la suite. La pression retombant je m’effondre en larmes dans les bras de ma chérie, heureux!

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Je retiendrai de cette course la beauté du paysage, la qualité de l’organisation et la densité du niveau. Je reprendrai les mots de T.Lorblanchet, « rallier un point à un autre est l’essence même du trail, la transju’ s’inscrit totalement dans l’état d’esprit de notre sport ! »

à bientôt, Jeff

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